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Spiritualité Moreau

Aller à Jésus par Marie et Joseph

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La mystique de Sainte-Croix est celle de l'incorporation au Christ. Le Père Moreau a établi dans ses Congrégations, comme principe surnaturel d'action, la doctrine de l'unité de tous les membres dans le Corps mystique du Christ, doctrine chère à l'apôtre saint Paul que le Fondateur s'est appropriée et a rendue sensible à ses enfants spirituels en leur proposant, comme le plus parfait modèle de cette unité sur terre, la sainte Famille de Nazareth.

 

A Nazareth, en effet, Jésus est réellement la tête, bien que Joseph soit le chef visible. Jésus est la source de toute autorité, l'auteur des grâces, des grandeurs, des mérites de Marie et de Joseph. La sainte famille, c'est déjà le Corps mystique organisé et opérant, avec une perfection qui ne sera jamais atteinte ailleurs, avec un amour qui s'élève déjà dans les sphères de l'infini.

 

Ce modèle est singulièrement choisi. Les fruits que produira la fidélité à le suivre sans défaillances, c'est l'union entre les filles et les fils spirituels du Père Moreau, à l'image de celle des trois Personnes divines dans l'auguste Trinité ; c'est aussi la gloire qui reviendra à ce Dieu trine, le seul auteur et le seul lien d'une telle charité fraternelle, selon ces paroles de Jésus à son Père : " Moi en eux, et toi en moi. Qu’ils deviennent ainsi parfaitement un, afin que le monde sache que tu m’as envoyé, et que tu les as aimés comme tu m’as aimé " (Jn 17, 23).

L'objet que doivent poursuivre ses membres, dans cette unité du Corps mystique, c'est la vénération, l'amour et la glorification de la Croix. Ils y trouvent, d'abord, attaché le Rédempteur, que le Père Moreau leur demande d'honorer sous le vocable du Sacré-Coeur ; ensuite, Marie, la mère des douleurs, qui se tient debout près de l'arbre sanglant, aux pieds de son fils mourant, s'identifiant en quelque sorte avec lui ; enfin, mystiquement, saint Joseph, qui, non seulement a gardé le Fils unique de Dieu, mais qui, de plus, à Nazareth, n'a cessé de participer aux premières souffrances de Jésus, prémices de son immolation au Calvaire.

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Les enseignements du Père Moreau ne sauraient petre plus formels sur ce point. Les paroles de sa lettre circulaire du 1er janvier 1857 en sont la formule claire et limpide : " Permettez-moi de vous désirer l'héritage de Jésus-Christ, écrivait-il à ses religieux, et celui que ses saints, dont nous sommes les enfants, nous ont légué. Cet héritage, c'est celui des humiliations, de la pauvreté et des souffrances ; c'est celui des épreuves et des tentations ; c'est celui des travaux et des persécutions de tout genres. En vain chercherions-nous une autre voie pour monter au ciel que celle du Calvaire ; toute la doctrine de l'Evangile se résume dans cette science de la folie de la Croix, que saint Paul annonçait aux gentils lorsqu'il ne leur prêchait que Jésus et Jésus crucifié, scandale pour les Juifs et folie pour les gentils ". Et la conclusion est la leçon qui garde toujours son actualité : " Dès lors nous siérait-il bien, à nous qui aspirons à marcher sur les traces de tant d'illustres modèles, de refuser le fardeau de la croix qu'ils ont si glorieusement portée ? ".

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Au pied de la croix, avec Jésus, Marie et Joseph, on trouve encore la source de tous les sacrements, de toutes les grâces, de tous les exemples de piété et de vertu, que le Fondateur a laissés aux siens pour leur édification. Aussi, pouvait-il leur dire : " Travaillez donc... à devenir des copies parfaites du divin modèle, et rien ne sera capable d'ébranler votre vocation, et les croix que vous rencontrerez dans l'accomplissement des devoirs de votre saint état, seront non seulement supportables, mais aimables, mais désirables, mais préférables à tout, parce que Jésus-Christ a préféré la croix à tout ".

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Le moyen le plus puissant pour que la Congrégation de Sainte-Croix réalise la gloire qu'elle est appellée à rendre à Dieu par Jésus, Marie, Joseph, honorés au pied de la Croix, doit aller puiser à la même source. Elle suivra donc, dans son exercice, la hiérarchie constituée par Dieu lui-même à Nazareth, selon la conception que le Fondateur s'en est faite : aller à Jésus par Marie et Joseph.

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Le Père Moreau, en donnant à ses deux congrégations d'hommes et de femmes, comme modèle à suivre, la sainte Famille, veut que dans leur piété elles mettent l'accent sur la puissance d'intercession de saint Joseph et qu'elles développent envers lui un culte de confiance bien particulier. A Nazareth, puisque Joseph est le chef visible, c'est à lui que l'on va, comme au maître de la maison, pour recommander un travail, présenter une réclamation, obtenir une faveur. C'est donc par Joseph que dans sa boutique de charpentier l'on arrive à Marie et Jésus. Tel est l'ordre hiérarchique suivi et établi dans l'exercice de la piété de la famille de Sainte-Croix.

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Cet ordre, toutefois, n'est pas de rigueur absolue. Toute prière au nom du Christ seul garde sa pleine efficacité. Mais celle qui, en plus, est présentée à Dieu par Marie et Joseph, prend une puissance que l'on peut qualifier d'invincible. L'Eglise, dans sa liturgie, qui est non seulement sa prière publique et solennelle, mais encore son enseignement authentique et populaire, met sur les lèvres de Joseph, dans la fête de son patronage, ces paroles qui confèrent au saint Patriarche un pouvoir sans bornes : " Quelle que soit leur tribulation, s'ils crient vers moi, je les entendrai et je serai leur protecteur à jamais, Alléluia ".

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Est-ce à dire que la puissance de Marie en est diminuée dans la pensée du Père Moreau ? Certes non, pas plus que ne l'est celle de Jésus. Mais, répétons-le, c'est que le Père Moreau veut suivre l'ordre qu'il a plu à Dieu, dans ses voies mystérieuses, d'établir dans l'économie de son plan rédempteur. Le Tout-Puissant lui-même, ne s'adresserait-il pas à Joseph, chaque fois qu'il intervient directement dans la conduite de la sainte Famille ? Les droits de Père que Joseph exerca sur Jésus et d'époux sur Marie, Dieu, loin de les lui avoir enlevés au ciel, les a complétés et consommés dans sa vie glorieuse. Le Père Moreau, dès les débuts de ses fondations et dans la suite, donne des preuves non équivoques de sa pensée sur cette formule de piété. Dans ses lettres circulaires, il recommande cette dévotion, en termes pressants. Il enseigne aux siens " qu'il entre dans les intentions du ciel d'unir ici-bas, dans notre vénération et notre amour, quoique à des degrés différents, les trois augustes personnes qui formaient sur la terre comme une image vivante de l'invisible Trinité ", et il les assure que s'ils savent bien les prier tous les trois, ils peuvent compter d'être exaucés " et en bénir d'avance la Providence ".

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A Jésus par Marie et Joseph, telle est donc la formule caractéristique de la piété de Sainte-Croix. Formule pleine, irrésistible, établie sur les meilleures raisons théologiques : Jésus, cause première de tout bien comme Dieu, médiateur parfait comme Dieu et homme ; Marie, corédemptrice du genre humain, toute-puissance suppliante ; Joseph, participant au plus haut degré de l'éminente dignité de la mère de Jésus, capable de nous assister dans tous les besoins de l'âme et du corps. Et enfin, remarquons-le en passant, le Fondateur de Sainte-Croix, comme pour indiquer l'échelle des valeurs spirituelles, en choisissant Notre-Dame des Sept-Douleurs pour la patronne de toute sa Congrégation, proclame, de fait, la puissance souveraine et incomparable de Marie comme médiatrice universelle. Il reste qu'en s'adressant à saint Joseph, on gagne à sa cause un intercesseur, dont les prières sont comme des commandements pour Marie, son épouse, et pour Jésus, son fils.

D'après Albert-F. Cousineau, c.s.c.

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